J’ai avorté…

J’ai eu mal au plus profond de mon être quand j’ai appris la loi anti-avortement votée en Alabama. J’ai envie de vomir quand j’entends le Vatican dire que l’avortement est pire qu’un viol. J’ai envie de hurler quand on dit qu’on emprisonnera les médecins qui pratiqueront des avortements !

Alors oui j’ai avorté ! Oui j’ose le dire et vous savez quoi ? C’est douloureux, pas physiquement mais moralement ! On se sent coupable, on s’en veut, on se pose sans cesse la question et si…. ?

Je vous confie ici mon histoire que j’ai rarement racontée, peut-être par honte, peut-être par culpabilité…

J’avais 15 ans, j’étais en seconde, et je suis tombée enceinte. C’est l’une des périodes les plus horribles de ma vie. Je n’ai même pas pu l’annoncer personnellement à mes parents, les mots ne sortaient pas de ma bouche, c’est une amie qui l’a dit à ma place. Après la colère et l’incompréhension de mes parents qui n’avaient pas réaliser que j’avais grandi, ils ont parlé d’avortement. Non, je ne voulais pas et j’ai essayé de les convaincre, j’avais même réussi pendant quelques jours à les en dissuader, mais finalement j’ai écouté la voix de la raison (ou pas) et nous avons pris rendez-vous au planning familial de l’hôpital.

Oh oui, je me souviendrai toute ma vie, de cette journée et surtout de cette horrible infirmière, qui juste avant l’intervention, quand on m’emmenait sur le brancard m’a dit « c’est bien fait pour toi, ça t’apprendra pour la prochaine fois ! ». Je ne pouvais pas voir son visage, car j’avais dû enlever mes lentilles pour l’anesthésie et je ne voyais absolument rien sans mes yeux ! Mais ses mots ont raisonné dans cauchemars durant des années et ils me hantent encore aujourd’hui. Je n’ai pas voulu avorter, mais c’était sans doute la décision la plus raisonnable à prendre.

J’ai été traumatisée longtemps par cet acte, par cette terrible journée. Avoir un enfant est devenu une obsession les années qui ont suivi, c’était devenu viscéral.

Par chance, j’ai rencontré mon mari très jeune et j’ai pu combler ce vide quand j’ai eu 21 ans ! Mon fils, ma vie !

Ma vie après avoir avorté…

Mais l’histoire ne s’arrêta pas là. Des années plus tard, j’ai subi une hystérectomie suite à de l’endométriose qui me priva à jamais d’avoir un second enfant biologique. Est-ce qu’inconsciemment je me suis punie à travers mon corps meurtri ? Peut-être ? On ne soupçonne pas assez le pouvoir de l’inconscient !

Ce que je n’ai pas dit, c’est que le père de l’enfant était noir, une très très mauvaise fréquentation (j’étais attiré par les très méchants garçon à l’époque…). Et il y a 7 ans, j’ai adopté une petite fille de couleur… Le cercle de la vie, la boucle est bouclée.

J’ai la chance d’avoir connu un dénouement heureux malgré la souffrance mais avorter n’est jamais un choix facile, il peut même être dévastateur. C’est une décision qu’aucune femme prend à la légère, elle touche à notre morale, à notre féminité mais aussi à notre liberté !

Est-ce que je regrette cette décision ? Non… plus maintenant. Avec le recul et la sagesse de l’âge, je me dis que je n’aurais jamais rencontré mon mari, je n’aurais pas eu l’enfant exceptionnel que nous avons conçu, je n’aurais certainement jamais adopté notre perle mauricienne, je ne serai pas qui je suis… si je n’avais pas prise cette putain de décision !

Alors merde, laissez-nous le droit de choisir, la liberté d’être mère quand nous l’aurons décidé ! Nous nous sommes battues pendant des années pour obtenir ce droit. Et pourtant, nous reculons de plusieurs décennies…cette loi, c’est une atteinte à la liberté de la femme !

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